jeudi 2 avril 2009

SOLEIL NOIR


Il y a un bas usage de toutes choses comme de tous les sentiments.
Il y a cet usage qui transforme tout en sang épais en soleil noir:
de quoi peut-être, aller d'une heure à l'heure suivante.
Vous prenez soin de n'appeler personne.
Puisque personne ne pourrait rien
Puisque rien ne vous arrive.
Il y a des saisons plus favorables que d'autres à cette fin des temps.
Disons l'été, quand le soleil pèse de toute sa lumière sur votre pensée.
Disons aussi l'automne.
Disons toutes les saisons,
puisque chacun peut vous mener ainsi dans son enfer.
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Depuis l'enfance vous avez beaucoup appris
sur ce dommage éternel de chaque jour.
Vous y avez trouvé votre formule du bonheur informulable.
Elle tient en un mot, et ce mot se tient sur un souffle
au bord des lèvres:
rien.
Un rien vous enchante.
Si un rien vous enchante, c'est parce qu'un rien peut vous anéantir.
La même lumière peut selon les heures et la direction du songe
vous exalter ou vous ruiner.
Sans nuances dans un cas comme dans l'autre.
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Souvent vous connaissez cette envie de sortir du jeu,
pour aller voir la lumière blanche dans le ciel large.
Ce désir d'aller contre vos intérêts immédiats de travail ou d'amour,
au nom d'un intérêt plus grand peut-être ou bien au nom de rien
Allez savoir...
Vous avez appris avec le temps à vous donner du temps.
vous avez appris à rompre pour continuer, pour continuer à votre
façon, à votre manière inventive et personnelle


Christian Bobin-La part manquante-p 88-90-Folio
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