Van der Weyden-Roger de la Pasture
Norge : le bois sacréUn arbre vaincu par la cognée,
Mordu par la scie et le rabot.
L’arbre avait encore assez de sève,
De moelle, de pulpe et de mémoire
Pour sentir gonfler ce noir printemps.
Ah ! plus de racine et plus de branche,
Ni bourgeon futur dans les entrailles,
Mais l’arbre, enfoncé sans pied ni tête,
Debout dans le sol et bras ouverts,
L’arbre avait encore assez de fibre
Pour sentir ces clous qu’on lui plantait,
Pour sentir brûler cette sueur,
Pour sentir saigner cette agonie,
Ô saigner comme un fleuve infini,
L’arbre avait encore assez de cœur
Et l’arbre sentit mourir Jésus.
Non ! ce n’est pas vrai, ce n’est pas vrai,
On dit ça pour faire poétique,
Mais l’arbre n’eut pas un tremblement.
Heureux de dormir dans son néant,
Le sang, l’agonie, il s’en fichait.
Le poteau n’eut pas un seul frisson.
Il régnait un calme universel
Et Jésus mourut sur du bois mort.
Géo Norge, Poésies 1923-1988
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire